La Cordillère
des Andes recèle quelques perles vraiment
exceptionnelles... La Cordillera Blanca
péruvienne, la Cordillera Real bolivienne en
sont peut-être les plus beaux joyaux.
Véritable épine dorsale du continent
sud-américain, la Grande Cordillère s'étire
sur plus de 7000 kilomètres, naissant au nord
avec les volcans Vénézuéliens pour venir
mourir en une myriade d'îles au sud du Chili,
entre Puerto Montt et Punta Arenas. Et c'est
peut-être au Chili justement que l'on ressent
le plus sa présence : une formidable frontière
naturelle avec la Bolivie et l'Argentine à
côté de laquelle la Grande Muraille de Chine
ressemble à une bien piètre clôture... Et
comme si ce n'était pas suffisant, le Chili
regorge de petits massifs montagneux,
indépendants de la Cordillère selon les
géologues. Le massif du Paine, plus connu sous
le nom des Tours du Paine (prononcez
"Paille-nez") est l'un de ces petits farceurs.
Un peu de
géographie pour commencer : bordée au nord par
le Campo de Hielo Sur ; immense champ de
glaces éternelles (imaginez la Mer de Glace,
et élevez la au carré !), délimitée à l'ouest
et au sud par un labyrinthe de fjords et de
canaux, vestiges du combat de titans que
durent se livrer un jour l'Océan Pacifique et
la Cordillère des Andes, et enfin à l'est par
les steppes infinies de la Patagonie
argentine ; cette région a une saveur de
bout du monde.
Le Parc National
des Tours du Paine est considéré mondialement
et à juste titre comme un haut lieu du
trekking, et ce n'est pas la foule de
"gringos" ou assimilés qui débarquent chaque
jour dans le terminal de bus de Puerto
Natales, affublés du dernier sac à dos The
North Face ou de la dernière polaire Patagonia
à la mode, qui me démentira ! La famille
Chapuis (prononcez "Tchapuisse" pour faire
couleur locale...) n'a pas échappé à
l'attraction fatale...
9 janvier 1998,
16h00, les Papas Chapuis ont un dernier regard
ému sur les pistes de décollage de Roissy.
Moins de 48 heures plus tard, les voilà qui
déambulent dans les rues ventées de Puerto
Natales, à la recherche d'une pension où ils
pourront enfin défaire leur sac à dos et
quitter leurs croquenots... En chemin, à
Santiago, ils ont retrouvé le fiston (votre
serviteur) qui pendant ces quelques jours de
vacances, leur servira de porteur, guide,
cuistot, traducteur, masseur et j'en passe et
des meilleures...
12 janvier :
trois heures de bus sur des chemins cahoteux
nous conduisent à l'entrée du parc où le
spectacle est d'emblée époustouflant. La
chance et le beau temps nous accompagnent, et
la vue sur les fameuses tours de granit est
grandiose. Pour combler le tout, quelques
guanacos (cousins sauvages des lamas) peu
farouches jouent les top-modèles à la grande
joie des touristes et de leurs appareils
photos ! Remplies les quelques formalités
(l'entrée dans les Parcs Nationaux chiliens
est payante), nous pénétrons de suite dans le
vif du sujet, sac sur le dos et bâtons à la
main...

Cliquer sur la
vignette pour accéder au diaporama
La première
étape nous conduit au pied de ces fameuses
tours : trois monolithes de granit de plus de
1000 mètres de dénivelé vertical. Sur leurs
faces se sont écrites et continuent à s'écrire
quelques très belles pages de l'escalade. A la
seule vue de ce beau rocher compact, les
doigts me démangent; qu'il doit être bon de
passer la nuit là-haut, pendu dans l'un de ces
dièdres ! Mais calme toi Arnaud, nous
sommes ici pour randonner à l'horizontale. La
grimpette, ce sera pour une autre fois.
Les étapes
suivantes nous font découvrir toute la beauté
sauvage de ce massif. Sept jours en autonomie
complète nous conduisent de torrents en
glaciers, traversant des prairies couvertes de
fleurs, des marécages ou des forêts, remontant
des moraines et des cols enneigés. La magie de
ce massif réside aussi dans la variété de ses
paysages ; il suffit de changer de vallée
pour découvrir une nouvelle facette de ce
véritable kaléidoscope naturel.
Peu de
randonneurs s'aventurent à réaliser le circuit
complet : le poids des sacs, les rigueurs du
climat et les difficultés du tracé (traversées
acrobatiques de torrents sur des souches
vermoulues, descentes « casse
gueule » sur des pentes d'argile
détrempées.) nous feront d'ailleurs tirer la
langue à plus d'une occasion. En fait, si la
partie est du parc, située près de l'entrée,
est relativement parcourue, il suffit d'une
petite journée de marche pour basculer de
l'autre côté du massif, beaucoup plus sauvage,
et pour s'affranchir des hordes de touristes
en basquettes.
La dernière
étape nous réservera, à l'occasion d'une
trouée opportune dans les nuages, une superbe
vue sur le groupe du Paine avec en son centre,
grandiose, la face sud -ouest du Cuerno del
Paine.
Et c'est plein
les yeux, plein les jambes, que la petite
famille se dirige maintenant 4500 kilomètres
plus au nord, vers le Salar d'Atacama,
fermement décidée à ne descendre de son 4x4 de
location qu'en cas de nécessité impérieuse.
Mais çà, c'est une autre histoire !